• La tournée des soixante-huit restaurants aux trois étoiles Michelin en soixante-huit jours, en passant par Rome, Tokyo ou New-York, même Jules Vernes n'y avait pas pensé. Et pourtant, c'est l'insensé défi que s'est lancé Pascal Henry, mystérieux suisse de quarante-six ans.

    De l'homme, on ne sait pas grand-chose, si ce n'est sa profession de coursier à moto. Il vit seul et parle peu de lui, même à ses amis. Une passion toutefois, la gastronomie. L'homme se rend régulièrement au restaurant de Gérard Rabaey avec lequel il prend l'habitude de parler cuisine après le repas, parfois des heures durant. C'est peut-être au cours d'une de ces cavalcades à moto, entre Genêve et Montreux, où s'est installé le chef normand, que le projet du coursier est né: cotôyer les étoiles, s'envoler soixante-six jours au pays des trois-étoiles, puis revenir sur terre. Du moins l'avait-il annoncé ainsi à ses amis, quelques jours avant d'entamer son périple. Et de disparaître.

    Le marathonien du goût apparaît, comme prévu, le 5 mai, chez Paul Bocuse. Il expose au célèbre cuisinier son projet, lequel, emballé, lui offre un livre d'or qu'il lui recommande de faire signer à chaque étape, et le recommande auprès de ses fameux collègues. Chaque jour, Pascal Henry se rend dans un nouveau restaurant. Le même rituel, toujours. Il commande le menu dégustation, s'attarde à table et paye cash. Peu à peu, son histoire se répand et Jacques Perrin, un célèbre chroniqueur suisse, se prend d'admiration pour son compatriote auquel il consacre plusieurs articles dans son blog.

    Le 12 juin, quarantième étape. Le Phileas Fogg de la gastronomie s'arrête en Espagne, au célèbre restaurant catalan El Bulli. La même routine que d'habitude. Il s'attarde, discute avec un couple voisin de table. Vers minuit, il se lève pour aller chercher une carte de visite dans sa veste, et disparaît. On ne le verra plus.

    L'alerte n'est pas donnée tout de suite. Peu habitués à avoir de ses nouvelles, ni sa famille ni ses amis ne s'inquiètent. Il faut quelques semaines pour que ses admirateurs, Bocuse et Perrin en tête, parviennent à médiatiser l'affaire et à faire engager de sérieuses recherches. La police espagnole fouillera les alentours du restaurant, en vain. L'enquête piétine, le dossier transmis à Interpol.

    Puis, vers la mi-août, la police suisse informe la police espagnole que le disparu a été aperçu à Genêve, il apparaît même sur la vidéo d'un distributeur automatique. Les recherches sont abandonnées sur la péninsule ibérique ; quant à la police suisse, elle n'engage pas de poursuite : après tout, l'homme n'est accusé de rien, le chef d'El Bulli ayant renoncé à la note du dîner. Quelques jours plus tard, un officier suisse laisse même entendre au journal Le Temps que la police saurait où se trouve Pascal Henry, tout en préservant sa tranquilité. Ah, la discrétion suisse...

    La question n'est maintenant plus de savoir si le motard-coursier-marathonien-gastronome est encore en vie, car la chose semble acquise. Surtout lorsqu'on apprend, il y a peu, que l'homme en est à sa seconde disparation soudaine, la première, c'était vingt ans plus tôt. Non, la question est plutôt de savoir pourquoi il a stoppé son voyage, en si bon chemin. Il en était déjà à la quarantième étape. N'avait-il plus d'argent ? A-t-il eu peur des proportions médiatiques qu'ont pris son insensé projet ? Voulait-il faire parler de lui en disparaîssant ? Voulait-il disparaître de façon spectaculaire ?

    L'Auberge Danoise -qui vaut bien ses trois-étoiles au guide Michelin- détient la réponse de cette fatidique question. C'en était si simple que personne n'y a pensé. Pascal Henry a stoppé son tour du monde des trois-étoiles Michelin, car il n'avait plus faim. CQFD.

     

    Pour plus de précisions sur cette affaire culinaire, voir les excellents, exemplaires et aériens articles de Jean-Claude Ribaut (Le Monde), de Vincent Noce (Libération), et le blog de Jacques Perrin.


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  • Bien qu'ayant signé une clause de confidentialité avec l'ESSEC, je ne trahirai aucun secret en révélant ici que la fameuse école de commerce utilise un logiciel américain pour gérer la scolarité de ses étudiants. Américain... jusqu'au stéréotype. Ainsi donc, lors de la sélection du sexe de l'étudiant, le choix est laissé entre "masculin", "féminin" et... "non disponible".

    Sont fous, ces américains.


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  • On nous avait prévenu, à vrai dire. En choisissant le Danemark, on acceptait son rigoureux hiver. Le plus dur n'étant ni la pluie, ni la neige, ni le vent frais qui fouette le visage, mais sa luminosité. Si le soleil apparaissait aux alentours de 9h du matin au plus tard -ce qui reste en soi raisonnable-, la nuit, elle, tombait entre 15h30 et 16h. Dur.

    Surtout lorsque tu fais la fête. Qui dit décembre dit, au Danemark, fin des cours et donc, occasion oblige (les danois trouvent d'ailleurs une occasion chaque semaine), fête et party. Et qui dit party dit lever aux alentours de midi, voire une heure de l'après-midi. Et dit, temps de manger, prendre une douche et de se préparer, un facile 15h voire 15h30 dehors. Soit à l'heure... où le soleil se couche.

    Evidemment, on savait aussi que l'été, c'était l'inverse. Ce soir, en descendant du bus, je remarquais l'exceptionnel luminosité du ciel, surtout à l'est. Une heure de plus et les lampadaires n'auraient, sans doute possible, plus d'utilité. Je jetais alors un coup d'oeil à mon portable, pour regarder l'heure. Il était, heure locale, 2h45 du matin.

    Après ça, faut pas s'étonner que les oiseaux danois se mettent à chanter dès 3h. 'Sont peut-être pas si fous que ça, finalement, ces autochtones.


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  • J'avais quatre enveloppes du Kollegiekontoret (l'organisme qui gère les logements étudiants) dans ma boîte aux lettres, samedi. C'était le rappel des consignes pour quitter les lieux. Le contenu des quatres enveloppes était identique.

    A croire que l'administration danoise veut vraiment se débarasser de moi :p


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  • On fait vraiment des découvertes étonnantes sur le Net. Ainsi donc faisais-je aujourd'hui une recherche sur le sabotage de l'administration Bush des travaux de l'OCDE sur le contrôle des paradis fiscaux, et tapait «paradis fiscal» dans Google. Si la première réponse était, évidemment, la page Wikipédia, la deuxième réponse avait pour nom de site web... http://www.paradisfiscaux.com, et pour descriptif un court mais clair message: «tout pour monter vous meme votre societe dans un paradis fiscal ou offshore, informations precises et objectives. 27 annees d'experience».

    Curiosité débordante oblige, un petit tour sur le site s'imposait. C'est ainsi que vous apprenez qu'installer son siège dans un paradis fiscal n'est pas intéressant pour les activités nécessitant des locaux, mais que «l'opération peut s'avérer juteuse pour toute activité de vente par correspondance, octroi de licences avec remontées de royalties, dépôt de brevets, dépôt de marques, propriétés de sites Internet, œuvres de l'esprit, droits d'auteurs, portefeuilles boursier, ou prestations de services (voyance, vente de conseils, de prestations, import-export, délocalisation d'achats en gros, trading international, etc...) et tout ce qui ne nécessite pas d'installations fixes et contrôlables». Quant au reste du site, il explique en détail quelles démarches effectuer pour créer son entreprise offshore. A noter, pour plus tard.

    Curiosité oblige encore, une petite recherche m'apprenait que taxhavens.com (l'équivalent en anglais de paradisfiscaux.com) n'existait pas, mais Google donnait quand même quelques réponses intéressantes, avec des sites web aux graphismes peu engageants mais aux noms évocateurs (comme http://belizetaxhaven.com ou http://www.bahamasbahamas.com) vous proposant d'économiser votre argent en vous réfugiant dans leurs paradis fiscaux, sous le titre «fatigué de payer trop d'impôts?».

    C'est ça aussi, la magie du Net.


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